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Religion

Sant'Efisio  Cagliari, Sardaigne

Il est commun d’entendre dire, qu’avec ses 80 km aller retour, la Sant’Efisio serait la procession la plus longue du monde. En tous les cas, depuis 1657, elle part invariablement de Cagliari tous les 1ers mai et rentre, de nuit, 4 jours plus tard.

 

Elle est l’expression de la promesse faite au XVIIe siècle par les institutions de la ville au Saint martyre, pour avoir mis fin à l’épidémie de peste qui ravageait Cagliari. À travers cette procession, la ville renouvelle chaque année sa reconnaissance et son engagement sans limite à perpétuer le pèlerinage. En retour Sant’Efisio protège Cagliari de toute forme d’invasion. Ainsi, en 1793, par exemple, lorsque la flotte française commença à bombarder la ville, les Cagliaritains s'en remirent à leur protecteur. Une violente tempête, considérée comme la réponse de Sant’Efisio à leurs prières, causa la débâcle des navires ennemis.

 

L’organisation de la procession est confiée à l’Arciconfraternita del Gonfalone, la confraternité dédiée au culte de Sant’Efisio. Même si devenir confrère est partiellement lié à une transmission de père en fils, « l'intégration » est soumise à une année de séminaire. Par ailleurs, depuis l’origine, un personnage tient un rôle important dans la procession, il s’agit de l’Alter Nos, « L’Autre Nous », le représentant de l’autorité. Au temps de la monarchie espagnole, c’est le Vice-Roi lui-même qui défilait. Aujourd’hui l’écharpe tricolore italienne et le médaillon de Toson d’oro sont confiés à un homme désigné par le maire de Cagliari pour ses qualités humaines et citoyennes. Celui-ci incarne le lien entre le religieux et le politique.

 

Mais tout commence quelques siècles auparavant. Efisio (250-303), qui est originaire d’Asie Mineure, est enrôlé par l’armée de Dioclétien (284-305) pour combattre les Chrétiens. D'où l'apparence guerrière du Saint, portant casque et cuirasse. Malgré son rôle militaire répressif au service de l’Empire romain, Efisio se convertit lui-même au Christianisme après une apparition. Cet acte, évidemment interprété comme une trahison, entraine son incarcération. Malgré les tortures qui lui sont infligées, Efisio ne renie pas sa conversion. Ses blessures, qui disparaissent de façon inexpliquée, provoquent même d’autres conversions autour de lui. Sa condamnation est alors inévitable et il est exécuté à Nora, un petit village situé sur le littoral au Sud Ouest de la capitale sarde. Le trajet suivi par la procession est celui qu’Efisio a parcouru jusqu'au lieu de son martyre. 

 

Le 1er mai, le jour du départ, la première messe est célébrée à l’église du Stampace, qui se trouve au dessus

de la crypte-cachot, creusée dans la roche, où Efisio a été retenu prisonnier avant d’être conduit à Nora. Après cette messe, un impressionnant cortège se met en place et sillonne la ville à pied, à cheval ou sur les chars richement décorés (is taccas). Des centaines de figurants, qui viennent de toutes les provinces de la Sardaigne, défilent dans leur costume traditionnel régional jusqu’à ce que le carrosse du Saint, tiré par une paire de bœufs, atteigne l’Hôtel de ville. Là, il est accueilli sur un tapis et sous une pluie de pétales de fleurs.

 

Un cortège, réduit aux pèlerins, prend alors ensuite la route de Sarroch, première étape nocturne de la procession. Sur le parcours, les haltes à Giorgino, Capoterra et Villa d’Orri permettent aussi bien des célébrations liturgiques que des opérations logistiques (telles que le renouvellement de l'attelage). De l'arrêt à la chapelle de Giorgino, Sant’Efisio ressort allégé de ses parures les plus précieuses et il est installé dans un « carrosse de campagne » moins sophistiqué et plus robuste pour le reste du voyage.

 

Le lendemain matin, la procession s’oriente vers Nora en passant par Villa San Pietro et Pula.

L’événement marquant de la troisième journée est la procession qui mène au site archéologique de Nora, car c'est là qu'Efisio fut décapité. Le retour à Pula s’effectue par la plage et sans carrosse. La statuette de Sant’Efisio est simplement portée à l'épaule par quatre hommes.

Enfin, le 4 mai, tout en passant par les mêmes étapes, c’est le retour sur Cagliari d’une seule traite. Les « pauses » sont écourtées pour atteindre la ville aux alentours de 22h.

À leur entrée dans Cagliari, les confrères revêtent un costume noir orné de la cocarde de l'année et se couvrent d’un chapeau haut-de-forme. Certains montent à cheval, aux côtés des miliziani en costume orangé avec leur toque cylindrique et leur sabre. Les groupes folkloriques se reforment et tous prennent part à l’impressionnant défilé de clôture de la Sant’Efisio. Autant dire que l’arrivée de la procession dans l’obscurité plonge la ville dans une atmosphère surnaturelle, et l’on peine à se situer entre mirage et réalité. Ainsi s’achève chaque année la Fête de Sant’Efisio.

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